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25/04/2014

Jean XXIII, Jean-Paul II : deux "saints de Vatican II"

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Une fidélité renouvelée, ressourcée, au noyau de la foi : oeuvre du concile lancé par le pape Roncalli et incarné par le pape Wojtyla...

 


Longtemps le catholicisme français fut parasité par deux clans : celui qui rabâchait son allergie à Vatican II, et celui qui agitait le mirage d'un "Vatican III" au lieu de vivre dans l'éclairage de Vatican II. Éclairage pourtant prophétique – mais ignoré de beaucoup de gens, parce que les catholiques ne se s'étaient pas donné la peine d'étudier Vatican II ! On le constate encore aujourd'hui : beaucoup préfèrent confondre le concile et le séisme antispirituel de 1968 ; ils refusent d'admettre qu'une grande partie de ce qui fut fait en 1970-1980 au nom de ''l'esprit du concile'', contredisait les volontés du concile.

Une paroissienne de mes amis confond ainsi 68 et Vatican II. Elle mêle les lieux communs de la droite aux griefs religieux. Elle n'a jamais feuilleté un texte du concile, ce qui lui permet de répéter deux vieux slogans : 1. pour zapper Vatican II, dire que ce concile ''n'a pas été dogmatique mais pastoral'' (alors qu'il a produit deux constitutions dogmatiques majeures : sur l'Eglise et sur la Révélation) ; 2. pour l'enterrer, dire qu'il était ''marqué par l'optimisme des années 1960'', et ironiser sur la ''naïveté utopiste'' censée marquer la constitution pastorale Gaudium et spes. Énorme erreur ! Ce que les passéistes ont taxé de ''naïveté utopiste'' dans Gaudium et spes (1965), ce sont des passages qui avaient trente ans d'avance sur la marche du monde. Ils indiquaient des signes prémonitoires  :

§ 4 « de profonds et rapides changements s'étendant progressivement au monde entier », « une véritable transformation sociale et culturelle qui exerce ses effets jusque sur la vie religieuse » ;

§ 6 « de nouveaux moyens de communication sociale » quidiffusent les opinions et les sentiments « le plus rapidement et le plus largement possible »;

§  30 la nécessité (malgré la tendance de l'époque) « de dépasser une éthique individualiste » ;

§ 54 « l'accroissement des relations entre les divers peuples et les divers groupes sociaux », préparant « une forme plus universelle de la culture humaine » ;

§ 55 le lien entre « l'unification du monde » et « le devoir qui nous est imposé de construire un monde meilleur dans la vérité et la justice » (« un nouvel humanisme pour lequel l'homme se définit avant tout par sa responsabilité à l'égard de ses frères et à l'égard de l'histoire ») ;

§ 56 des mises en garde, nullement marquées par un optimisme excessif : « que faut-il faire pour que les échanges culturels plus fréquents, qui devraient conduire a un dialogue vrai et fructueux entre les divers groupes et les nations, ne bouleversent pas la vie des communautés, ne causent pas la ruine de la sagesse ancestrale, et ne mettent pas en danger le génie propre de chaque peuple ? » ; « comment l'éclatement si rapide et toujours croissant des disciplines particulières peut-il être concilié avec la nécessité d'en réaliser une synthèse et de sauvegarder chez les hommes la faculté de contemplation et d'admiration qui conduit à la sagesse ? » ; « comment reconnaître comme légitime l'autonomie que la culture revendique pour elle-même, sans que l'on aboutisse à un humanisme purement terrestre, voire hostile à la religion ? »;

§ 58 l'indépendance du christianisme par rapport aux cultures particulières : « l'Eglise, envoyée à tous les peuples de tous les temps et de toutes les régions, n'est liée, de façon exclusive et indissoluble, à aucune race ou nation, à aucun genre de vie particulier, à aucune coutume ancienne ou récente » ;

§ 62 ce préalable à toute évangélisation : « que les fidèles vivent en union étroite avec les autres hommes de leur temps, et qu'ils s'efforcent de saisir à fond leurs manières de penser et de sentir » ;

§ 63 la critique de « l'économicisme » des pays riches : «  au moment où le développement de la vie économique, pourvu qu'il soit géré et coordonné de manière rationnelle et humaine, pourrait réduire les inégalités sociales, il conduit au contraire trop souvent à leur aggravation et même, ici ou là, à une détérioration de la condition sociale des faibles et au mépris des pauvres... » ;

§ 64 une alternative au productivisme : « la finalité fondamentale n'est pas l'accroissement pur et simple des biens produits ni le profit ou la puissance, mais c'est le service de l'homme, de l'homme tout entier, eu égard à l'ordre de ses besoins matériels et des exigences de sa vie intellectuelle, morale, spirituelle et religieuse ; de tout homme et de tout groupe d'hommes, des hommes de toutes races et de toute région du monde. C'est pourquoi l'activité économique doit s'exercer, selon ses méthodes et ses lois propres, dans les limites de l'ordre moral [1],de sorte que se réalise le dessein de Dieu sur l'homme » ;  etc.

Ce texte écrit en 1965 avait trente ans d'avance sur la mondialisation marchande, dont il pressentait les pouvoirs et les dangers.

Mais ses intuitions ont été tournées en ridicule (et le sont encore) par des catholiques rivés à un mythe passéiste. 

Et elles sont tues par ceux qui réclament un ''Vatican III'', espérant ce qui ne viendra jamais : l'alignement de l'Eglise sur la dérégulation mentale et morale propre aux pays riches !

Ces deux clans, passéistes et ''progressistes'', poursuivent des fins séculières extérieures à la foi... même s'ils empruntent une partie de son vocabulaire.

D'où l'urgence de mettre en lumière la vérité de Vatican II. S'il y eut une ''rupture conciliaire'', ce n'est évidemment pas avec la foi : c'est avec une phase historique révolue de l'histoire du christianisme. Portant d'avance un regard lucide sur sa position au XXIe siècle, et pour évangéliser un monde livré au paganisme mercantile, l'Eglise a décidé de ne s'appuyer que sur l'Esprit Saint (et sur les hommes de bonne volonté). Et cette rupture est l'expression de la plus profonde continuité : une fidélité renouvelée, ressourcée, au noyau de la foi chrétienne comme le soulignait le discours d'ouverture du concile par Jean XXIII, reproduit et commenté dans le lien indiqué par la note précédente.

 

__________ 

[1] "Dans les limites de l'ordre moral" (v.o. : "intra fines ordinis moralis") veut dire : a) que l'activité économique ne saurait être illimitée, ce qui exclut le productivisme ; b) qu'elle est subordonnée au "service de l'homme tout entier"  alors que, selon le libéralisme réel (réalisé dans l'histoire), l'activité économique ne connaît d'autre but qu'elle-même... et subjugue tous les autres domaines.

 

Commentaires

MACIEL

> On voit apparaître une petite musique médiatique mensongère qui utilise l'affaire Maciel contre Jean-Paul II qui serait de ce fait indigne d'être associé à la même cérémonie que Jean XXIII. Il est important de rappeler que Maciel sévissait déjà du temps de Jean XXIII, qu'il avait fait l'objet de dénonciations à Rome qui n'avaient pas eu les suites qui auraient été nécessaires (supplément d'enquêtes, suspension de Maciel de ses responsabilités...). Les deux papes ont été trompés l'un et l'autre par cet homme pervers et par certains membres de son entourage qui étaient probablement au courant.
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Écrit par : B.H. / | 25/04/2014

PAUL VI

> Paul VI a dit ce qui était arrivé dans la mauvaise réception du concile : " le diable est venu pour étouffer les fruits du concile". C'est exactement la parabole évangélique : le diable vient dans la nuit semer l'ivraie au milieu du bon grain. Et le matin, la confusion est telle qu'il est impossible de séparer le bon grain de l'ivraie ; au point qu'il est préférable d'attendre que le moissonneur (Dieu) fasse son œuvre. C'est la lumière de Dieu qui vient dissiper les "fumées de Satan".

Je crois cependant qu'il y a une lumière du concile qui n'a pas été étouffée : l'appel universel à la sainteté, l'apostolat et la responsabilité des laïcs, l'idée que nous aussi les laïcs vivons selon une vocation divine. Cela est aujourd'hui bien ancré dans l'Eglise. Et là, je crois que le rôle de Jean-Paul II a été déterminant pour la génération qui n'a pas connu le concile mais qui a pu en intérioriser un aspect majeur.

Parler de "Génération Jean-Paul II" n'est pas un artifice de communication, il a transmis la vigueur de la foi et une certaine vertu de force. Pour beaucoup, les JMJ ont été une expérience qui a influé de manière décisive sur un choix de vie avec le Christ. Je suis vraiment ému qu'il soit canonisé demain. Comme Français, j'associe aussi au souvenir de JPII celui de Mgr Lustiger qui a redonné vigueur à la foi dans l'Eglise de France et a su former une nouvelle génération de prêtres pour accompagner et former une jeunesse chrétienne qui ignorait souvent l'essentiel de la foi.

@ BH :

> Jean-Paul II mérite vraiment la qualification de "Grand" donné par Benoît XVI : grand par la foi, grand par l'importance qu'il a dans l'histoire de l'Eglise et même dans l'histoire du monde etc.

Certains veulent focaliser l'attention sur ses erreurs. Toute vie d'homme, même sainte, a ses zones d'ombre et ses erreurs, petites et grandes. Mais nul ne peut amoindrir la formidable piété populaire qui a immédiatement suivi sa mort. Il a été, de facto, "santo subito". La vox populi a parlé : c'est aussi cela que l'Eglise confirme et valide demain ; ce n'est pas seulement la sanction d'un procès, loin de là.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 26/04/2014

DÉRIVE ?

> Pourquoi toutes ces canonisations ou projets de canonisation concernant des papes? je m'interroge : ne serions-nous pas en train d'assister à une grave dérive? comme si le Saint-Siège ressentait le besoin de multiplier les canonisations de papes pour rehausser son prestige auprès des catholiques! Et l'extrême rapidité avec laquelle s'est fait le procès en canonisation de Jean-Paul II, l'empressement à reconnaître les miracles réglementaires, ne me rassure pas.

Les vertus propres à Jean XXIII et Jean-Paul II ne sont pas en cause, mais je suis inquiet devant ce qui a tout l'air d'une fuite en avant.
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Écrit par : Blaise / | 26/04/2014

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